Rituels dans l’espace public, entre continuité et rupture : qui peut changer Carnaval ?

Traces

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14:00 - Présentation de La Fonderie

14:15 - Écoute

(image : Hors-série)
(image : Hors-série)

Mohamed Amer Meziane (FR/US), Entretien autour de l'invisible dans les arts (en français)

La création contemporaine s'est progressivement tournée vers l'idée du rituel pour en faire une alternative à la forme du spectacle. Ce geste mérite d'être interrogé car ses implications sont multiples: Toute performance est-elle de l'ordre du rite? L'art tel que nous le vivons est-il un produit du désenchantement du monde ? Si tel est le cas, pouvons-nous réellement refaire du rituel sans souscrire à l'hypothèse d'un réenchantement illusoire voire impossible ? De telles questions méritent d'être explorées pour saisir les mutations actuelles des arts dans le cadre de bouleversements cosmopolitiques et historiques plus vastes. C'est ce que proposera cet entretien. 

Mohamed Amer Meziane est philosophe et historien formé à la Sorbonne (Paris). Il est maintenant enseignant à l'Université de Brown en tant que professeur d'études françaises et du Moyen-Orient, après avoir enseigné pendant quatre ans à l'Université de Columbia. Il est l'auteur de The States of the Earth: An Ecological and Racial History of Secularization ("Les États de la Terre : une histoire écologique et raciale de la sécularisation").  Son deuxième livre s'intitule At the Edge of the Worlds: Towards a Metaphysical Anthropology ("Au bord des mondes : vers une anthropologie métaphysique"). Le premier est une ethnographie historique des philosophes occidentaux du XIXe siècle et de théoriciens non occidentaux inconnus, notamment d'Algérie et d'Haïti. De Rousseau et Hegel à Abdelkader, il montre comment l'anthropologie et l'orientalisme ont façonné les histoires entrelacées de l'(anti)-métaphysique philosophique et des sciences sociales. Son deuxième livre déploie une philosophie de la révolution algérienne, en se concentrant sur les philosophies et les littératures de libération nord-africaines.

15:00 - Discussions croisées

Facilitation - Emmanuelle Nizou

Emmanuelle Nizou a un parcours en programmation et coordination artistique dans les arts de la scène. Elle engage des collaborations avec des collectifs qui inventent, au croisement de l’art et de l’activisme, des stratégies d’intervention dans la sphère publique pour penser la place des communs. Elle est membre de Désorceler La Finance.

(image : La Voix des Sans-papiers)
(image : La Voix des Sans-papiers)

La Voix des Sans-papiers (BE), La Résistance des Invisibles

Le 1er juin 2024 avait lieu la 13ème édition de La Zinneke Parade, événement Bruxellois traditionnel où le milieu associatif de la ville compose des "Zinnodes" et défile dans les rues muni de chars et de costumes. Le thème de cette édition était "Plaizir". La Voix des Sans Papiers a proposé une Zinnode nommée "La Résistance des Invisibles". Voici leur communiqué : "Nous sommes sans papiers mais pas sans voix. Nous luttons par tous les moyens nécessaires pour arracher nos droits. L’art est l’un de nos outils. Dans la grande parade impérialiste de l’Occident qui s’enrichit des saccages chez nous, nous devons inventer nos propres costumes, nos propres chants, habiter nos propres territoires. La rue est l’une de nos maisons. Et nous travaillons pour construire ou nettoyer les vôtres. Pourtant, l’Etat et ses médias font de notre présence un crime, de notre cri, un silence.   Ceci n’est pas un spectacle, c’est une manif. Nous ne sommes pas là juste pour le plaizir, nous avons un message à faire passer sur une pancarte dirigée vers le Ciel : NOUS EXISTONS."

Depuis plus de 50 ans, des collectifs de sans-papiers se structurent, se mobilisent pour une reconnaissance de leurs droits. En 2012, la marche des sans-papiers va parcourir plusieurs pays européens, dont la Belgique, en demandant la liberté de circulation et d’installation pour tous·tes les migrant·es. En 2014, une nouvelle marche des migrant·es traverse l’Europe de Berlin à Marseille sous l’appellation de Caravane européenne des migrants. Elle fait étape en juin 2014 à Bruxelles où plusieurs Personnes sans-papiers décident de créer un collectif : La Voix des Sans-Papiers Bruxelles (VSP). Depuis 2014, de nombreuses actions et activités au sein des bâtiments que VSP occupe permettent au collectif, malgré les violences policières et administratives, de s’organiser pour ses membres.

(image : Laurent Poma)
(image : Laurent Poma)

La Consœurie des Connasses (BE), Nous sommes des créatures de pets

La Consœurie des Connasses est issue de CHARIVARI, une action en art partagé menée par Sara Selma Dolorès et Bastien Poncelet. Depuis 2020, iels ont mené des ateliers à Central (Centre culturel de La Louvière) conjuguant l’esprit carnavalesque à la culture queer, pour questionner l’héritage patriarcal de cette tradition folklorique. Au cours de ceux-ci les participant·es dansent, chantent, se maquillent et créent des costumes. La Consœurie des connasses et sa Gilette -réappropriation de la figure folklorique du Gilles- nait lors de la Soumonce du Carnaval de La Louvière 2023. Pour Feral, Les Connasses partagent leurs expériences, entre subversion et perpétuation des traditions. 

Autrice, metteuse en scène et comédienne, Sara Selma Dolorès est une figure de la scène queer historique bruxelloise. Elle fait notamment partie du duo Boudin & Chansons dont nait un spectacle en forme de règlement de compte avec les hommes, avec les femmes, avec les mères, avec le féminisme. Elle se dirige vers la performance et fixe sa première jarretière avec le collectif Bas Nylon en 2014. Cette saison, elle présentera au Théâtre de la Balsamine son premier spectacle avec un public captif, RIRE (pour en finir avec soi-même).

Bastien Poncelet est scénographe et costumier. Également performeur et drag queen belge, il est Kimi Amen qu'il déploie dans son cabaret sans domicile fixe : Le Grand Bordel National et dans des lieux connus de la vie nocturne bruxelloises tels que le Cabaret Mademoiselle.

Avec Dolorès, il déploie CHARIVARI, une action d’art en commun afin de rendre leur labilité aux folklores contemporains.

(image : fabonthemoon)
(image : fabonthemoon)

Le Carnaval Sauvage (BE), Comment grandit le Carnaval Sauvage

L'une des questions qui précédaient la création du Carnaval Sauvage était : pouvons-nous, nous aussi, inventer une tradition ? Le collectif racontera comment le Carnaval Sauvage s'est construit sur un tri et un réinvestissement des traditions carnavalesques européennes qui le précédaient ; mais aussi sur des pratiques collectives (costumes, musiques, procès, chars, parcours, feu...), une organisation horizontale et indépendante et un investissement auto-légitimé de l'espace public.

Le Carnaval Sauvage est organisé depuis 2012 à Bruxelles par un collectif ouvert au fonctionnement horizontal. C'est un jeune carnaval qui va autant fêter la fin de l'hiver que pointer les processus de gentrification. Il vise à réinventer une tradition qui reflète quelque chose de ce que vivent ceux et celles qui le font et à développer d'autres figures d'altérité. Après avoir jugé le Promoteur Immobilier et la Bureaucratie, le cortège s'élance à travers les quartiers populaires de Bruxelles. Hors des sentiers battus, mais pas hors des préoccupations sociales.

(image : Marcel Queralt)
(image : Marcel Queralt)

Anaïs Vaillant (FR), À qui et à quoi la tradition peut-elle appartenir ?

Comment les pratiques carnavalesques permettent-elles de repenser la notion de tradition et d'expérimenter des ritualités festives ? Cette discussion s'appuiera sur les activités du laboratoire du Collectif Anonyme du Carnaval Ambulant, groupe informel et activiste travaillant depuis 2009 à réinsuffler une dynamique carnavalesque contemporaine dans différents milieux sociaux et faire rencontrer des carnavals dits traditionnels avec des carnavals dits autonomes.

Anaïs Vaillant est anthropologue et artiste pour la rue, la scène et les ondes. Elle travaille sur les traditions, appropriations et inventions culturelles dans les manifestations festives populaires en France, au Brésil et ailleurs.

(image : Cifas)
(image : Cifas)

17:30 - Lancement de la Revue Feral n°2

Lors de la dernière édition de Feral, Hanna El Fakir (textes) et Nino André (dessins) étaient en mission spéciale pour prélever et partager des traces du festival. Fabrique de la ville et alliances en zones humides, co-conçue avec la graphiste Lucie Caouder, en témoigne.

En plein air et fin d’été, in situ et en itinérance depuis la piscine FLOW jusqu’au dissident Marais Wiels, en short et en maillot de bain, des questions essentielles étaient abordées.

Partant du cas concret du Marais Wiels et d’autres lacs insurgés, comment s’élaborent l’imaginaire urbain ? Quel est l’état des interactions entre les politiques et la société civile quand s’invitent et s’inventent de nouveaux espaces publics ? Quel rôle l’art joue-t-il dans tout cela ? Permet-il d’ouvrir des voies spécifiques dans la fabrication d’une ville sensible ?

La Revue Feral n°2 rend compte de cette traversée collective, et redonne la parole aux intervant·es et aux expériences partagées. On y retrouve entre autres Stalker et son École d’Urbanisme Nomade, Cuesta et l’urbanisme culturel tout comme la cartographie mentale du Marais dessinée par Laurent Petit de l'ANPU, des paroles engagées et transformatives.

En cette fin de journée nous vous invitons à fêter avec nous la sortie de ce deuxième numéro de la Revue Feral.

En présence de Hanna El Fakir (textes) et Nino André (dessins). Avec une scénographie conçue par Tom & Nicolas Valckenaere.